Parfois je me demande pourquoi La Faucheuse a décidé de faire de moi un chasseur. J’aurais tout aussi bien pu avoir ma place au sein de la φramide, non ? Cela dit, en y repensant bien… Pas forcément. Certes, le côté créatif m’attire beaucoup, mais rester bloquer toute la journée à un bureau, le cul sur sa chaise, non merci. Est-ce qu’elle avait prévu que je ne pourrais pas tenir en place ? J’ai décidément très envie de la voir pour lui poser plein de questions.

Mais là n’est pas mon but de la journée. Aujourd’hui, c’est quelque chose de bien moins joyeux qui m’attend. Des règlements de compte. Après avoir passé plusieurs jours à chercher des informations sur le type désagréable à souhait que j’ai croisé la dernière fois, j’ai appris qu’il bossait ici. Un créatif alors, hein ? Et c’est pour ça qu’il se donne cet air si prétentieux, hautain et détestable ? Je ne l’ai croisé qu’une fois et je sais déjà que je ne peux pas l’encadrer.

Il a eu le culot de se moquer de moi, et je ne peux pas le digérer. Me dire, à moi, que je suis beau, comme ça, de but en blanc, et puis quoi encore ? Que les tâches qui parsèment ma peau sont magnifiques ? Il faut arrêter de se foutre des gens et surtout, d’attaquer le physique. J’imagine parfaitement ce que ce type s’est dit dans sa tête. « C’est qui ce gars multicolore ? Ça existe des gens comme ça ? Et si je lui dis qu’il est beau ? Personne doit lui dire, ça lui fera sans doute plaisir, le pauvre. »

Et je n’en veux pas, de sa pitié. Pire encore, s’il a fait ça uniquement dans le but de se moquer, il aura droit à mon poing dans la figure. Sérieusement, qu’est-ce que je lui ai fais ? J’étais sur son chemin ? Au mauvais endroit, au mauvais moment ? Et bien je vais inverser les rôles.

Alors, quand bien même j’ai toutes les raisons de ne pas vouloir le recroiser, une insulte ne doit pas rester impunie. Et je refuse qu’il pense que tout lui est permis. Je ne connais pas son nom, mais je suis sûr et certain de le reconnaître si je l’aperçois. Je reste donc attentif aux personnes autour de moi, espérant à chaque virage apercevoir cette tête brune.

Après avoir dépassé je ne saurais dire combien de bureaux, je prie pour être sur la bonne voie. Et enfin, je le vois. Mon sang ne fait qu’un tour, impatient d’enfin mettre les choses au clair avec ce type. Je me dirige vers lui, ne me préoccupant pas le moins du monde de s’il est occupé ou non. Le déranger dans son travail serait même encore mieux, je l'avoue. Je me plante devant lui, bien décidé à rester là tant que je n’aurais pas obtenu ce que je veux.

- J’attends tes excuses.

Pas de bonjour, pas de présentation, pas de vouvoiement. Ce type ne mérite aucune politesse. Et ces excuses ont intérêt à sonner vrai, sinon, il va m’avoir sur le dos pendant un bon moment.